PLANTES MEDICINALES,
MEDECINE TRADITIONNELLE ET PHARMACOPEE,
LE CAS
DU TOGO
par
AHYI AYITE
Association Togolaise pour la
Promotion du Développement rural
(SOTOPRODER)
1.
INTRODUCTION
Ces dernières années, les plantes médicinales, la
médecine traditionnelle et la pharmacopée sont l’objet d’une attention toute
particulière de la part de la communauté mondiale en général et de l’OMS en
particulier. Ainsi, une pléthore de personnalités scientifiques d’horizons
divers a commencé à se soucier des connaissances et du savoir-faire de leurs
pays respectifs. Quand on sait qu’il y a de cela quelques décennies le
tradipraticien était traqué par le pouvoir colonial, arrêté et jeté en prison
pour pratique illégale de la médecine, il est facile de comprendre pourquoi
pendant longtemps la médecine traditionnelle et la pharmacopée avaient été
reléguées aux oubliettes. Notre communication se propose de fournir aux
participants à ce séminaire–atelier des informations sur la situation du Togo
dans les domaines des plantes médicinales, de la médecine traditionnelle et de
la pharmacopée. En d’autres termes, il s’agit des activités réalisées, projets
et programmes, politiques nationales, etc.
2.
LES
ACTIVITES REALISEES
Au
Togo, les actions menées paraissent insignifiantes au regard du peu de
publicité dont elles ont été entourées. Cependant, l’honnêteté oblige à
reconnaître que les Ministères de Recherche Scientifique et de la Santé
Publique s’occupent du problème de la médecine et de la pharmacopée
traditionnelles. Le problème de la reconnaissance officielle et/ou d’une
intégration quelconque reste tributaire d’une bonne connaissance des paramètres
et des solutions possibles à court, moyen et long termes avec toute la prudence
requise pour les perspectives.
Il
faut préciser qu’en 1979, un Comité Interministériel de recherche
pluridisciplinaire sur les technologies appropriées, a été créé et placé sous
le patronage commun du Ministère du Plan et de la Réforme Administrative et du
Ministère de la recherche Scientifique. Ce Comité Interministériel était
composé de plusieurs commissions dont celle de Santé–Pharmacopée, chargée de
l’étude exhaustive de la situation de la médecine traditionnelle et des
approches scientifiques de sa rénovation en vue de sa réhabilitation.
Ce
rapport a cerné en son temps tous les paramètres du problème compte tenu des
actions précédemment menées tant sur le terrain qu’au laboratoire de
Togopharma, dans le cadre d’un recensement des thérapeutes traditionnels
assorti d’un inventaire des recettes et techniques de traitement des matières
médicales utilisées et de la connaissance des divers milieux.
La
commission Santé–Pharmacopée est composée d’une équipe pluridisciplinaire qui
s’est penchée dans son rapport sur l’étude du contenu de la médecine
traditionnelle. Elle a présenté à la lumière de ses travaux la méthodologie
d’une nouvelle approche scientifique de cette médecine au Togo en vue de sa
rénovation et de sa réhabilitation. La commission Santé-Pharmacopée a défini
les conditions et moyens d’action avec des objectifs immédiats, des objectifs à
court et moyen termes, et des objectifs à long terme. Les thèmes de recherche
n’ont pas été perdus de vue. Ils ont été classés par priorité.
Cette
commission a poursuivi ses travaux après l’élaboration de son premier rapport.
Elle a joui d’un appui particulièrement bénéfique dans l’exécution d’une
mission ethnobotanique organisée au Togo en juillet–août 1984, conjointement
par l’Agence de Coopération Culturelle et Technique (ACCT) et le Gouvernement
Togolais (Ministère de la recherche Scientifique), pour l’étude de la flore en
général avec un accent particulier sur les plantes médicinales et leurs divers
usages thérapeutiques. A cette occasion, vingt-trois (23) chercheurs de toutes
les disciplines concernées venus des pays de l’ACCT, y compris le TOGO ont
sillonné tout le territoire national togolais pendant cinq semaines pour
inventorier la flore, recueillir des informations utiles sur les vertus
thérapeutiques des plantes et des matières médicales d’origine animale.
3.
PROJETS
ET PROGRAMMES : LES ACQUIS
En ce qui concerne les projets et programmes, il y a lieu
de noter :
–
la création d’une commission d’étude des modalités d’organisation et de
revalorisation de la médecine traditionnelle par le Ministère de la Santé
Publique et de la Population;
–
la création en perspective d’une Division de la Médecine Traditionnelle au
sein du même ministère;
–
la mise en place d’un programme de développement de la culture des plantes
médicinales couramment utilisées et celle des espèces médicinales en voie de
disparition;
–
la lutte contre la destruction des écosystèmes naturels et la dégradation
de certains écosystèmes forestiers, notamment dans la région montagneuse du
Sud–Ouest;
–
la mise en place d’un Centre de Recherche et de Formation sur les Plantes
Médicinales;
–
l’élaboration d’un programme de recherche dont l’objectif est la rédaction
d’un guide de phytochimie dont une partie relative aux alcaloïdes est déjà
achevée;
–
la création au sein de l’Université nationale d’un Centre de Phytothérapie,
Sensibilisation et Assistance aux Malades (CPHYSAM).
4.
LES
PERSPECTIVES
Les perspectives de
développement de la médecine traditionnelle et de la pharmacopée pour un mieux
être des populations requière des objectifs bien précis et la poursuite de onze
(11) actions à savoir :
1.
l’inventaire exhaustif de la
flore.
2.
l’étude des plantes médicinales en vue de leur connaissance systématique,
biologique, pharmacologique et pharmacodynamique approfondie à partir des
usages thérapeutiques en vogue au niveau de chaque ethnie
(ethnopharmacognosie) ;
3.
l’étude des thérapeutiques naturelles en vue d’engager une meilleure
approche scientifique pour une médecine traditionnelle rénovée et
réhabilitée ;
4.
la contribution à l’étude des modalités pratiques d’une collaboration
synergique étroite des deux systèmes de soins (médecine moderne et médecine
traditionnelle rénovée) en présence ;
5.
la contribution à l’étude des traitements des maladies préoccupantes ou
rebelles aux soins de la médecine moderne officielle ;
6.
l’étude des possibilités de production de phytomédicaments à moindres
frais, notamment pour les malades les plus démunis et les populations
rurales ;
7.
la contribution à l’étude de la médecine traditionnelle et de la
pharmacopée africaines entreprise par les pays francophones et anglophones
membres de l’OUA et d’autres organisations internationales ;
8.
l’étude des effets indésirables et/ou iatrogéniques des médicaments
traditionnels originaux et ceux des études et expérimentations en vue de la
rénovation et de la réhabilitation du système traditionnel ;
9.
la contribution à la protection des ressources naturelles de la médecine
traditionnelle et de ses pharmacopées (matières premières des trois (3) règnes
dans les différents écosystèmes) ;
10.
contribution au recensement des thérapeutes traditionnels en vue de les
aider à s’identifier, à se connaître mieux entre eux pour s’informer, sortir de
l’ombre, se perfectionner davantage, structurer leur association nationale pour
répondre valablement aux exigences d’une collaboration fructueuse nationale et
internationale ;
11.
la contribution au recensement des chercheurs et spécialistes de tous
ordres concernés par le domaine en vue d’une action concertée nationale,
régionale et internationale.
5.
CONCLUSION
La médecine
traditionnelle et la pharmacopée constituent en Afrique en général et dans
chaque pays en particulier un patrimoine culturel, scientifique et économique
dont l’importance et l’impact ne portent plus l’ombre d’aucun doute. Il est
indéniable que cette médecine qui fait ses preuves a un fondement solide.
L’utilisation appropriée de sa quintessence ouvrira une voie salutaire pour la
réalisation de l’objectif santé pour tous en l’an 2000 prévu par l’Organisation
Mondiale de la Santé (OMS). La réhabilitation tant souhaitée de cette médecine
et de cette pharmacopée, depuis plusieurs décennies, aux fins d’une
harmonisation et d’une collaboration fructueuse avec la médecine classique,
doit être une option politique et juridique assortie de toutes les précautions.
La création d’instituts
pluridisciplinaires basés sur un système suffisamment souple pour sécuriser
l’accès du thérapeute traditionnel aux services de santé publique, codifier
l’exercice de sa profession sans qu’il y ait aliénation d’aucune sorte,
introduire dans la pratique courante les médicaments traditionnels d’efficacité
prouvée, développer l’enrichissement scientifique et culturel réciproque, ce
sont là des aspects à étudier minutieusement en vue d’élaborer avec les moyens
requis des mécanismes réalistes dans l’intérêt de la santé publique en Afrique.
6.
REFERENCES
BIBLIOGRAPHIQUES
AHYI AMR : Médecine traditionnelle, Pharmacopées Africaines et
développement durable.
HODOUTO K. ET SONGOI A.S. : Nouvelle
approche expérimentale de l’étude chimique des phytomédicaments.
ADJANOHOUN, EJ ; ADJAKIDJE V. ;
AHYI AMR et coll. (1989) : Contribution aux études ethnobotaniques et
floristiques au Togo.
AHYI AMR : Processus de développement
de la médecine traditionnelle et des soins de santé primaires.
AKPANGANA K. ET BOUCHET P. : Les
espèces végétales et leur utilisation en thérapeutique.
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