La Place Des Pharmacopées Et Des Institutions Officielles
Chargées De La Santé Dans La Valorisation Des Plantes Médicinales Et De La
Médecine Traditionnelle.
Dr.
Michel Ratsimbason
Centre
National d'Application des Recherches Pharmaceutiques - CNARP -
BP 702
Antananarivo 101 Madagascar
email :
mratsimb@syfed.refer.mg
Résumé
:
Introduction
La décision de valoriser
la médecine traditionnelle provenait de la difficulté d'approvisionnement et de
l'insuffisance des médicaments d'importation, ce qui rendait leur prix
prohibitif. Les plantes médicinales, sources de médicaments bien connus,
s'offraient comme une solution à ce problème. La démarche effectuée vers les
plantes médicinales était de produire des phytomédicaments. On espérait ainsi
apporter une solution à la pénurie et à la cherté des médicaments, le but final
étant de fournir des produits accessibles à la majorité mais offrant un garanti
d'innocuité et d'efficacité. Les axes prioritaires pour canaliser les efforts à
fournir furent orientés très logiquement vers les principales maladies
tropicales. Les efforts entrepris et le but de la création des laboratoires
étaient de mettre à la disposition et à la portée du plus grand nombre, des médicaments
ou phytomédicaments efficaces. Après près de 20 ans des débuts des travaux en
ce domaine, les résultats sont loin des espérances attendues. Toutefois les
efforts fournis n'ont pas été totalement vains. Des points positifs ont été
acquis qu'il importe maintenant de valoriser et d'exploiter. Ces efforts ont
permis d'acquérir du recul et de voir sur quels points les efforts doivent se
focaliser un peu plus. Les raisons de cette faiblesse de résultat sont
nombreuses et ont été parfaitement analysées par ailleurs. Pour notre part,
nous allons proposer quelques observations tirées de nos propres activités dans
le domaine de tentative de valorisation des plantes médicinales.
Les
axes prioritaires de recherche définis il y a 20 ans sont-ils toujours d'actualité?
Aperçu
et contexte socio-économique et santé publique :
Les
données statistiques sanitaires sur la fréquentation des 11 postes sentinelles
de surveillance épidémiologique des maladies transmissibles, répartis sur
l'ensemble du territoire national Malgache, données étalées sur 3 ans
(95-96-97), sont reportées sur le graphique : Statistiques sanitaires. Le
graphique montre que les premières causes de morbidité, en ce qui concerne ces
maladies, sont les suivantes: les infections respiratoire aiguës, suivies du
paludisme et les diarrhées en troisième place. Les infections de la peau et les
maladies sexuellement transmissibles occupent respectivement la quatrième et la
cinquième place. Ces données statistiques donnent un aspect quantitatif de ce
que les services de santé officiels ont toujours constaté. Les cas de
malnutrition figurent dans la liste car il est reconnu qu'une malnutrition
sous-jacente est souvent présente dans ces maladies. Dans un pays tel que
Madagascar, il est primordial que ces maladies épidémiologiques soient mises sous surveillance et à combattre en premier lieu. L'épidémie de paludisme des années 1980 ayant sévi sur les régions centrales de l'île et la récente épidémie de choléra prouvent la nécessité de cette surveillance. Ces données sont en parfait accord avec le rapport de l'O.M.S. sur la santé dans le monde (1997). Ce rapport précise que le groupe de maladies le plus meurtrier dans les pays pauvres sont les maladies infectieuses et parasitaires. Créée au sein du Ministère de la Recherche il y a une vingtaine d'années, la première institution gouvernementale nationale de recherche ayant pour mission l'étude des plantes médicinales (CNARP) s'est vu notifiée par le Ministère chargé de la santé de consacrer leurs efforts en premier lieu sur ces maladies sévissant beaucoup plus dans des régions tropicales, ou caractéristiques des pays du tiers - monde. La raison est la suivante, à l'instar de beaucoup de pays, Madagascar a connu et rencontre encore des problèmes économiques importants où inflation et chômage en sont les conséquences. Il en résulte un appauvrissement de la majorité de la population et un pouvoir d’achat très faible. La situation de précarité, un faible réseau de voies de communication terrestre, favorisent l’utilisation des plantes médicinales et de la médecine traditionnelle par une grande majorité de la population, non seulement dans les régions reculées, difficile d’accès, mais aussi dans les grands centres urbains. Les autres maladies ne doivent pas être négligées, car il n'en demeure pas moins que les maladies cardio-vasculaires, métaboliques ou autres constituent aussi un problème de santé, puisque le même rapport de l'O.M.S. sus cité place les mortalités d'origine cardio-vasculaire en deuxième place après les maladies infectieuses et parasitaires, dans les pays en développement. À notre connaissance, aucune enquête quantitative ne permet cependant de préciser pour quels genres de maladies, la population a le plus recours aux plantes médicinales ou à la médecine traditionnelle. Les enquêtes ethnobotaniques et les pharmacopées qui en résultent sont d'une précieuse aide dans le choix des plantes et des maladies vers lesquelles orientées les recherches. Les enjeux et l'avenir de nos plantes en dépendent.
Graphique
"Statistiques sanitaires"
voir fichier
excel.
Merci
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Madagascar, il est primordial que ces maladies épidémiologiques soient mises sous surveillance et à combattre en premier lieu. L'épidémie de paludisme des années 1980 ayant sévi sur les régions centrales de l'île et la récente épidémie de choléra prouvent la nécessité de cette surveillance. Ces données sont en parfait accord avec le rapport de l'O.M.S. sur la santé dans le monde (1997). Ce rapport précise que le groupe de maladies le plus meurtrier dans les pays pauvres sont les maladies infectieuses et parasitaires. Créée au sein du Ministère de la Recherche il y a une vingtaine d'années, la première institution gouvernementale nationale de recherche ayant pour mission l'étude des plantes médicinales (CNARP) s'est vu notifiée par le Ministère chargé de la santé de consacrer leurs efforts en premier lieu sur ces maladies sévissant beaucoup plus dans des régions tropicales, ou caractéristiques des pays du tiers - monde. La raison est la suivante, à l'instar de beaucoup de pays, Madagascar a connu et rencontre encore des problèmes économiques importants où inflation et chômage en sont les conséquences. Il en résulte un appauvrissement de la majorité de la population et un pouvoir d’achat très faible. La situation de précarité, un faible réseau de voies de communication terrestre, favorisent l’utilisation des plantes médicinales et de la médecine traditionnelle par une grande majorité de la population, non seulement dans les régions reculées, difficile d’accès, mais aussi dans les grands centres urbains. Les autres maladies ne doivent pas être négligées, car il n'en demeure pas moins que les maladies cardio-vasculaires, métaboliques ou autres constituent aussi un problème de santé, puisque le même rapport de l'O.M.S. sus cité place les mortalités d'origine cardio-vasculaire en deuxième place après les maladies infectieuses et parasitaires, dans les pays en développement. À notre connaissance, aucune enquête quantitative ne permet cependant de préciser pour quels genres de maladies, la population a le plus recours aux plantes médicinales ou à la médecine traditionnelle. Les enquêtes ethnobotaniques et les pharmacopées qui en résultent sont d'une précieuse aide dans le choix des plantes et des maladies vers lesquelles orientées les recherches. Les enjeux et l'avenir de nos plantes en dépendent.
RÉFLEXION SUR LES ÉLÉMENTS, ENJEUX ET PERSPECTIVES DES
PLANTES MÉDICINALES ET LA MÉDECINE TRADITIONNELLE :
La
médecine traditionnelle et les plantes médicinales peuvent-elles être encore
source de solutions pour des maladies?
En
parallèle à l'installation des laboratoires de recherche, un effort
considérable a été fourni pour dresser un inventaire écrit des plantes
médicinales auxquelles ont recours la pratique populaire pour se soigner. Dans
le cas de Madagascar, l'institution nationale qui s'est attelé à cette tâche ,
une des premières a entreprendre ce travail sur le plan national, (CNARP) a
réuni dans deux pharmacopées les plantes en usage dans deux régions distinctes
de l'Île. Grosso modo la méthode d'enquête ethnobotanique consiste à
l'interrogation des tradipraticiens et de la population locale sur les plantes
et leurs utilisations thérapeutiques. Comme dans toute enquête ethnologique de
ce genre, il est difficile de faire une correspondance exacte entre la
symptomatologie empirique décrite par la population et une maladie précise
définie de manière médicale, mais ces données ont leur importance, dans le
choix des plantes et des travaux à effectuer.
Les deux pharmacopées
sont les suivantes :
· la pharmacopée -1- de l'Alaotra, établie en 1984 et recensant 266 plantes
d'une région de la région orientale de Madagascar.
· la pharmacopée -2- de l'Ambongo et du Boina, établie en 1993 et recensant
354 espèces de deux régions contiguës de la côte Ouest de Madagascar.
Parmi les avantages
d'avoir une pharmacopée celui de pouvoir établir une banque de données à partir
des listes de plantes est indéniable. De ces deux pharmacopées, des listes des
plantes pouvant être utilisées dans les principales pathologies dominantes,
telles qu'elles sont classées à partir des statistiques sanitaires des postes
sentinelles de santé, ont été faites.
Pharmacopée -1- :
Alaotra :
Maux de ventre : 51/266 19 %
Maladies vénériennes : 40/266 15 %
Fièvre dont le paludisme : 28/266 10 %
Pathologie de la sphère respiratoire
25/266 9,4 %
Pharmacopée
-2- : Ambongo et Boina :
Maux de ventre : 88/354 25 %
Fièvre dont le paludisme: 58/354 15 %
Pathologie de la sphère respiratoire
39/354 11 %
Maladies vénériennes : 31/354 8,7 %
Ces chiffres et
pourcentage de plantes utilisées pour une catégorie de maladies méritent
quelques observations. En faisant l'assertion qu'il y a une relation directe
entre le nombre de plantes utilisées pour une maladie et l'importance de la
maladie dans une région donnée, on peut établir une classification des
maladies. Exception faite pour les maladies vénériennes, on remarque suivant
l'importance des espèces citées pour traiter une catégorie d'affections qu'on
peut établir la séquence suivante : les maux de ventre, suivis de la fièvre et
enfin les affections des voies respiratoires. Pour les deux pharmacopées ces
quatre maladies recueillent le plus grand nombre d'espèces de plantes utilisées
pour les soigner. En ce qui concerne les maladies vénériennes, pour la
pharmacopée -1- de l'Alaotra, région orientale de l'île, les plantes utilisées
dans les maladies vénériennes occupent la deuxième place après celles utilisées
dans les maux de ventre et diarrhées. Les plantes utilisées pour la même
pathologie occupent la quatrième place pour la région Ouest de Madagascar,
Pharmacopée -2- de l'Ambongo-Boina. il apparaît que les maladies vénériennes
constituent une des maladies majeures, pour la pharmacopée -1- de la région de
l'Est de Madagascar. Elles arrivent en seconde place, tout juste après les maux
de ventre. Elles sont au quatrième rang à l'Ouest de Madagascar, pharmacopée
-2-. Pour la pharmacopée -2-, cette maladie des voies génitales tendrait à être
à la même place que les maladies sexuellement transmissibles (MST) qui figurent
dans le diagramme établi avec les chiffres des postes sentinelles de santé.
Sans considération aucune de l'ordre et des infections cutanées, la
correspondance des quatre premières maladies classées selon le nombre des
plantes pour les traiter est frappante avec la classification des quatre
premières maladies objet de fréquentation importante au niveau des centres de
santé. Par contre l'ordre d'importance est pratiquement inversé. Il faut noter
que le graphe des "Statistiques sanitaires" reporté ici concerne les
postes sentinelles de santé répartis sur l'ensemble du territoire national, et
que les caractéristiques régionales sont masquées de ce fait.
Il faut surtout retenir
lorsqu'on rapproche ces statistiques sanitaires, des renseignements extraits de
ces pharmacopées sur l'état sanitaire d'une localité, la correspondance dans
l'ensemble, des maladies pour lesquelles les gens viennent dans les postes
sentinelles de santé et celles pour lesquelles ils ont recours à la médecine
traditionnelle et aux plantes en particulier. Avec la réserve évidemment que
tout ce qui est fièvre n'est pas forcément la malaria et que les affections
respiratoires ne sont pas forcément des infections respiratoires aiguës, et que
tous les maux de ventre ne sont pas des diarrhées. Il apparaît aussi que les
affections pour lesquelles on utilise un grand nombre de plantes médicinales,
sont les mêmes affections que celles pour lesquelles les institutions de
recherche sont chargées de combattre : les diarrhées, la toux et les maladies
de la sphère respiratoire, le paludisme et les maladies parasitaires, vingt ans
plus tôt. À côté des maladies émergentes, ce sont les trois pathologies
permanentes, à propos desquelles on doit constamment rester très vigilant. Ces
observations nous apparaissent, comme des arguments encore forts pour maintenir
et intensifier les travaux sur les plantes.
À
défaut donc de statistiques fiables sur l'utilisation des plantes pour une
catégorie de maladies, les données consignées dans les pharmacopées peuvent
donner un aperçu de la place qu'occupe une plante dans les pratiques
traditionnelles en matière de soin. Il résulte de l'analyse des données des
pharmacopées que les enjeux de la médecine traditionnelle et des plantes
médicinales, à l'heure actuelle et sur le plan sanitaire, demeurent donc les
mêmes que ceux pour lesquels le Ministère chargé de la santé a chargé le centre
de recherche du Ministère chargé de la recherche de combattre.
Les
pharmacopées : Aide à la décision dans le choix des plantes à étudier
Les
institutions engagées dans les travaux sur les plantes sont tributaires sur les
espèces à étudier des enquêtes ethnobotaniques sur terrains, qui resteront la
base indispensable de leurs travaux. Le fait d'avoir des pharmacopées apporte
un argument supplémentaire dans le choix d'une famille ou d'espèces de plantes
à étudier. Le nombre de citations de la plante, on peut le penser, est le
reflet de sa grande utilisation dans la médecine populaire. En général une
plante est utilisée pour plusieurs affections et l'établissement d'une liste
des plantes traitant au moins deux des trois maladies : maux de ventre, fièvre
et affections des voies respiratoires, a permis de dégager 6 plantes sur 266 à
partir de la Pharmacopée -1- : Alaotra et 32 sur 354 pour la Pharmacopée -2- :
Ambongo et du Boina. Le tableau suivant regroupe les six espèces de plantes
utilisées au moins dans deux des trois affections suivantes : intestinales,
respiratoires ou fébriles, pour la pharmacopée -1- de l'Alaotra :
Liste des six plantes parmi les plus utilisées tirées
de la pharmacopée -1- de l'Alaotra
Famille
|
Genre
|
Espèce
|
Nom vernaculaire
|
Anacardiacées
|
Mangifera
|
indica L.
|
Manga
|
Composées
|
Helichrysum
|
gymnocephalum (Dc) H. Humb
|
Rambiazina vavy
|
Composées
|
Elephantopus
|
scaber L.
|
Difikaombalahy
|
Labiatacées
|
Ocimum
|
gratissimum L.
|
Romba
|
Labiatacées
|
Hyptis
|
pectinata Poit.
|
Rombatsahona, afolava
|
Rubiacées
|
Danais
|
sp
|
Maroampototra
|
Avant le choix
définitif, des recherches bibliographiques, orientées vers les travaux
chimiques ou biologiques, la densité de la plante, sa rareté, le statut de la
plante : espèce protégée ou non, doivent compléter les informations sur ces
plantes. Notons au passage la présence de trois plantes aromatiques dans la
liste : Helichrysum gymnocephalum, Ocimum gratissimum et Hyptis pectinata. Les avantages de
l'établissement de telles listes est de pouvoir faire des tests sur plusieurs
modèles biologiques expérimentaux, au moins deux, sur une plante et ses
extraits. Il est même permis d'envisager de lancer un programme d'ensemble de
travaux à partir d'une telle liste : recherches pharmaco-chimiques,
cultures,.... Les pharmacopées, non seulement servent ainsi de base à tous les
travaux d'exploitation ou de conservation des plantes médicinales, mais ce sont
aussi une manière de pérenniser le savoir traditionnel de nos guérisseurs
traditionnels et de leur rendre hommage en immortalisant un savoir qui se perd,
la transmission orale ayant ses limites.
Les
Pharmacopées Et Les Autoroutes De L'Information :
À
l'aune du troisième millénaire et la révolution dans la communication
qu'introduit les autoroutes de l'information et qui abolit les distances et les
frontières, il est souhaité que les chercheurs Africains mettent à profit cette
puissante technologie pour se transmettre des informations pertinentes pour
avancer et gagner du temps dans leurs travaux. Cette technologie devrait être
mise à profit pour une grande diffusion ou accessibilité des pharmacopées
existantes. Une réorganisation dans ce sens, entre nous premiers intéressés et
premiers bénéficiaires des résultats sur ces plantes, est un défi à relever.
L'INTÉGRATION DES DEUX MÉDECINES, MÉDECINE TRADITIONNELLE
ET MÉDECINE MODERNE :
Force est de constater
que les deux mondes se sont côtoyés sans se rencontrer, chacun œuvrant de son
côté sans trouver un terrain d'entente bien que les finalités soient les mêmes
: le bien être individuel, de la société. Pour les pays africains qui ont connu
une domination étrangère, la mise en veilleuse de tout ce qui touche de près ou
de loin les valeurs et cultures nationales, a contribué à occulter les
pratiques traditionnelles de santé. Les plantes médicinales, en parlant de
l'exemple Malgache, ont subi cette relégation pendant la période coloniale. On
s'efforce actuellement à la reconnaissance et à la remise en valeur de ce
savoir, par un effort de recensement des tradipraticiens, de leur conférer un
statut légal ou autre, pouvant leur redonner la pratique de leur savoir sans
qu'ils aient peur que l'administration leur cherche noise.
Opposition
Entre Les Tradipraticiens Et Les Médecins :
Dans
la difficulté de l'intégration des deux systèmes, le fonds du problème réside
dans les deux conceptions différentes de la maladie et de ce fait de la grande
différence dans l'acquisition du savoir et du pouvoir (l'autorisation) de
soigner. En général, elle est complètement ésotérique chez le vrai tradipraticien. Avoir le pouvoir
de soigner, et donc l'autorisation de soigner, est "un don".
L'acquisition du savoir est un amalgame de ce don et de l'expérience. Ce n'est
pas une profession à proprement parler, mais une action obligatoire pour le
tradipraticien d'aider ceux qui viennent recourir à son savoir, et il laisse
aux malades le libre arbitre de lui montrer de la reconnaissance. Il subvient à
ses besoins en vaquant à ses propres travaux de culture ou d'élevage. Cette
acquisition du savoir et de l'autorisation de soigner, se font selon des
modalités et traditions scolastiques chez nos médecins et professionnels de la santé, qui ont leur ordre, leur
déontologie et des lois qui régissent leur métier. Le défi à relever est de
trouver le moyen de faire bénéficier l'un et l'autre des acquis des deux
systèmes.
L'insuffisance
D'une Assise Médicale Pour Valoriser Les Plantes Médicinales :
Lorsque
les travaux sur ces plantes médicinales furent entrepris, et confiés à des
institutions nationales de recherche, ce fut d'abord, pour donner une assise
scientifique sur l'efficacité des plantes médicinales. C'est à dire, après une
vérification d'activité, reproductible au niveau des laboratoires, leur donner
une présentation standardisée, conservable, avec une dose précise et une
toxicité connue et contrôlée, en un mot un médicament au sens moderne du terme.
Mais il est vrai qu'aucunes mesures d'ensemble, inscrites dans un programme unifié
et cohérent, n'ont été prises pour que les résultats positifs acquis par les
institutions scientifiques de recherche, puissent être validés et disséminés,
pour le bénéfice du plus grand nombre. L'absence d'une assise médicale se fait
cruellement sentir à ce niveau.
Pour
citer l'exemple Malgache, des exemples de collaboration ont été tentés entre
les tradipraticiens et les médecins sous l'impulsion d'initiatives
individuelles, mais ils restent ponctuels. Des efforts sont entrepris
actuellement pour légiférer sur les tradipraticiens et les plantes médicinales.
Les Ministères chargés de la santé et de la recherche collaborent dans ce
domaine avec la participation active de différents ONG, intervenant dans le
domaine de la santé ou du social. Ils sont encore à pied d'œuvre et il est
prématuré de se prononcer sur les résultats de l'entreprise (et d'autres
personnes sont mieux placées et plus compétentes pour en parler).
Toutefois, les modèles
proposés d'intégration doivent respecter l'intégrité des deux systèmes. En se
référant toujours au cas de Madagascar, à l'heure actuelle, il nous paraît
difficile de voir un tradipraticien œuvrer officiellement dans un centre de
santé (sous la tutelle du Ministère chargé de la Santé). Les raisons sont
celles évoquées plus haut: la déontologie des médecins, la loi en vigueur sur
les médicaments et l'exercice de la médecine, le problème du statut à conférer
au tradipraticien dans une telle situation. Le schéma qui prévaut en général,
est le suivant: Une équipe pluridisciplinaire travaille au sein d'un groupe
d’enquête et d’approche auprès des tradipraticiens ou de la population ayant un
savoir sur la vertu des plantes. Il est possible qu’il y ait des médecins au
sein du groupe, mais cette mesure est insuffisante, car cette présence n'engage
nullement le Ministère de la santé sur les résultats éventuels. Une des voies
pour rendre le personnel médical confiant dans les plantes médicinales, et par
voie de conséquence un certain respect vis à vis du savoir des tradipraticiens,
est de leur confier une responsabilité directe dans la vérification de
l'activité et de l'efficacité des plantes ou des phytomédicaments.
Il faut que les services
officiels de santé soient impliqués davantage dans la valorisation de la
médecine traditionnelle en général et des plantes médicinales en particulier.
Le travail actuel de valorisation est uniquement fondé sur des travaux
scientifiques, au niveau des laboratoires de recherche, et se fait
indépendamment des structures officielles de santé, qui ont le dernier mot pour
tout ce qui est médicament à mettre à la disposition du public. Notre ambition
étant de donner le statut de médicaments aux plantes médicinales, cette
ambition doit se traduire par une décision politique prise au plus haut niveau,
et s’accompagner de mesures telles que les services officiels de santé puissent
statuer, sur les compositions à base de plantes médicinales, ou
phytomédicaments, à mettre à la disposition du public. À coté des institutions
de recherche sur les plantes médicinales, il doit exister au sein de la
structure officielle de santé, une entité pouvant entreprendre des travaux ou
pouvant faire entreprendre des contrôles cliniques, d’efficacité et d’innocuité
(études toxicologiques), sur ces préparations à base de plantes. L’existence
d’une telle structure est nécessaire lorsque la finalité est la mise sur le
marché local de nouveaux produits
pharmaceutiques créés et conditionnés localement et pour les besoins locaux,
qu'ils soient à base d’extraits de plantes ou d’autres origines. Il va de soi
que cette structure officielle doit travailler de plein concert avec les
institutions de recherche œuvrant dans le domaine des plantes médicinales, qui
elles n'ont pas les obstacles que rencontrent le corps médical pour collecter les
données sur les plantes médicales et les tester sur leurs modèles expérimentaux
et qui collaborent déjà étroitement avec les tradipraticiens. Elles serviront
de lien entre le monde médical et les tradipraticiens.
Impacts
Sociaux Et Économiques :
L'instauration de cette
structure permettra d'une part d'établir une pharmacopée des plantes poussant
sur nos territoires, faite non plus à partir seulement de la tradition orale,
mais avec une base scientifique et clinique. Cette dernière faisant défaut pour
le moment. L'intérêt de ce travail n'est pas uniquement social, il peut aboutir
à l'instauration d'une industrie pharmaceutique locale, pour la production et
la distribution des phytomédicaments potentiels. Un programme de ce genre ne
peut s'appuyer uniquement sur la récolte, mais des projets de culture et de
conservation des plantes sélectionnées sont leur pendant obligatoire. Un effet
économique est attendu, mais il est évident que ni le corps médical, ni les industriels ne se lanceront
dans l'utilisation et l'exploitation de nos plantes que si cette caution
d'efficacité et d'innocuité n'est pas assurée.
Conclusions
:
Les
conditions écologiques qui prévalent de par le monde avec le développement de
l'industrie rendent primordiales les travaux de conservation et de préservation
des plantes médicinales. Les travaux d'inventaire botanique et l'établissement
de pharmacopées, consignant les plantes utiles à la santé sont parmi les
premiers travaux à entreprendre. La forte pauvreté encore régnante en Afrique
et la précarité d'une frange de la population ne pouvant accéder au système de
soin officiel, donnent encore une importance particulière et actuelle aux
plantes médicinales, d'un coût modique. Les pharmacopées existantes qui sont,
en quelque sorte, la mémoire écrite des tradipraticiens sur ces plantes
médicinales doivent être rationnellement exploitées pour arriver à la mise au
point de phytomédicaments, accessibles au plus grand nombre. Cet objectif
nécessite une implication beaucoup plus prononcée des responsables politiques
pour sortir les plantes médicinales de sa marginalisation actuelle. La
coopération étroite des institutions de recherche travaillant dans le domaine
des plantes médicinales et les institutions officielles de santé est à
renforcer. L'instauration au sein de la structure médicale officielle d'une
institution chargée de la validation clinique des phytomédicaments créés à
partir de nos plantes médicinales est recommandée pour cet objectif. Des
réglementations doivent être envisagées et accompagnées la mise en place de
cette structure. Pour cela, la volonté politique des dirigeants est
primordiale.
Références
:
· Rabesa, Z.A.. 1986. La pharmacopée de
l'Alaotra. Antananarivo : Fanantenana, - 288p., photogr., biblio.
· Rakotobe, E.A.; Rasolomanana, C.J.-C.; Randrianasolo S.S. 1993. Pharmacopées de l'Ambongo et du Boina. Antananarivo
: CIDST, - 727p., photogr., biblio.
· Bulletin D'Information En Épidémiologie Et Santé Publique. Ministère de la
santé/FAC/OMS/UNICEF; Antananarivo, Madagascar; n° 0 Juin 1995 au n° 13
Septembre 1998.
· Ratsimbason, M. Analyse statistique des données sanitaires du dispensaire
catholique d'Ambalamanenjana, pour l’« Étude des milieux et de la
faisabilité d'un développement sanitaire intégré dans la région d'Ambalamanenjana
». Rapport de la mission CNARP/DPL.Min San. Juin 1996.
· Andriantsiferana, R. Étude des milieux et de la faisabilité d'un
développement sanitaire intégré dans la région d'Ambalamanenjana. Rapport final
de la mission CNARP/DPL. Min San. Juin 1996.
O.M.S., 1997. Rapport
sur la santé dans le Monde 1997.- Vaincre la Souffrance, Enrichir l'humanité.
(Rapport du Directeur Général Dr H
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