NIVEAU
ACTUEL DU DEVELOPPEMENT DE LA MEDECINE TRADITIONNELLE EN GUINEE
Ernest GAMY
MINISTERE DE LA SANTE PUBLIQUE
REPUBLIQUE DE GUINEE
1 -
INTRODUCTION
Comme partout ailleurs en Afrique, parallèlement à
l’utilisation des services qu’offrent les Centres de Santé et les
établissements hospitaliers, une importante fraction de la population guinéenne
(estimée à 80%), recourt quotidiennement aux soins de la médecine
traditionnelle, tant dans les zones rurales que dans les centres urbains.
Dans le souci d’assurer des soins de santé efficaces et
accessibles à toutes les collectivités, le Gouvernement Guinéen a entrepris
depuis plusieurs années, d’intégrer au système national de santé cet important
potentiel que constitue la médecine traditionnelle.
L’objectif spécifique visé est de valoriser et
d’optimiser l’utilisation des ressources de la médecine traditionnelle
(tradipraticiens et médicaments traditionnels), en éliminant les pratiques
traditionnelles nuisibles à la santé, dans le cadre général du développement
des soins de santé primaires.
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La recherche
w
La formation
2 -
RESUME DES REALISATIONS
Dans le cadre de l’intégration, les activités suivantes
ont été réalisées :
w
L’élaboration du document de politique nationale en matière de médecine
traditionnelle avec l’aide de l’OMS. Ce document a été adopté par le Conseil
des Ministres en sa session du 8 mars 1994 et promulgué par Décret de Monsieur
le Président de la République en novembre 1994.
w
L’élaboration des textes organiques définissant les tâches dévolues aux
responsables de santé à tous les niveaux de la structure sanitaire
nationale ; il s’agit :
-
Du texte concernant l’organisation et le fonctionnement du Ministère de la
Santé publique ;
-
Du texte relatif à l’organisation et au fonctionnement des structures
déconcentrées du Ministère de la Santé Publique.
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L’élaboration de la réglementation relative à l’exercice de la médecine
traditionnelle, intégrée au code de santé publique et de l’action sociale.
w
La définition des règles d’éthique applicables aux recherches sur la
médecine traditionnelle, dans le cadre général du code d’éthique pour la
recherche en santé, lui aussi intégré au code de santé publique et de l’action
sociale.
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La mise en place des associations des tradipraticiens dans les préfectures
de Lola, Guéckédou, N’Zérékoré, Macenta et Siguiri.
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L’élaboration du Plan Directeur de la Médecine Traditionnelle en Guinée
pour six ans.
Dans le domaine de la recherche, les principales
activités réalisées sont les suivantes :
w
Le recensement des tradipraticiens de la Guinée Maritime et de la Guinée
Forestière, sur financement l’OMS et de l’ACCT, en vue de la constitution du
fichier national des tradipraticiens ; dans le même temps, le recensement
des vendeurs de médicaments traditionnels sur les marchés de Conakry a été
réalisé.
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L’organisation d’enquêtes ethnothérapeutiques auprès des tradipraticiens de
Guinée Forestière (sur financement de l’OMS et de l’ACCT), ainsi qu’auprès des
vendeurs des médicaments traditionnels sur les marchés de Conakry. L’objectif
de ces enquêtes est de recueillir les informations concernant les dénominations
vernaculaires des maladies, leur étiologie, leur clinique, leur traitement,
ainsi que les données relatives au rituel et aux interdits éventuels liés aux
traitements.
w
La production de douze documents portant sur les résultats des enquêtes
menées en Guinée Maritime, sur financement OMS, et de deux documents sur les
enquêtes réalisées auprès des vendeurs de médicaments traditionnels de
Conakry ;
w
La confection d’un album des principales plantes médicinales de Guinée
Maritime et de Guinée Forestière, sur financement OMS ;
w
La réalisation conjointe avec l’ORSTOM d’une enquête sur les thérapies
traditionnelle des maladies de la fécondité ;
w
La production par l’ORSTOM de quatre documents sur les résultats des enquêtes
menées sur les thérapies traditionnelles des maladies de la fécondité ;
w
La production en collaboration avec l’ORSTOM d’un document portant sur la
Médecine Traditionnelle et MST/SIDA ;
w
La production d’un document sur la Pharmacopée Traditionnelle Guinéenne ;
w
L’élaboration par l’Université après inventaire floristique, de six
lexiques des principales plantes médicinales correspondant aux six principales
langues nationales parlées dans le pays à savoir le Susu, le Pular, le Maninka,
le Kissie, le Lomangoï et le Kpèlè. Le nombre total des plantes recensées dans
ce cadre se chiffre à 800 environ ;
w
La réalisation de l’étude pharmacognosique par l’Université, de près de 150
plantes de la Pharmacopée Traditionnelle Guinéenne. La démarche adoptée est la
suivante :
-
Etude botanique, description macroscopique et microscopique de la
plante ;
-
Etude de la répartition géographique, détermination des lieux d’élection,
de la densité du peuplement et de la saison appropriée pour la récolte ;
-
Etude des usages populaires, description des usages tels qu’indiqués par
les tradipraticiens ;
-
Etude chimique : identification et dosage des principes généraux et
des principes doués d’activité physiologique ;
-
Etude pharmacologique : vérification de l’activité thérapeutique
présumée de la plante, détermination des limites de toxicité ;
-
Etude galénique : proposition d’une forme pharmaceutique améliorée,
stable et diffusible avec indication d’une posologie ;
-
Etude clinique : évaluation de l’efficacité et de l’innocuité
thérapeutiques.
Dans le cadre de la formation, plusieurs séminaires ont
été organisés dont entre autres :
w
Un séminaire de formation des chargés de Médecine Traditionnelle en Guinée
Maritime sur financement OMS ;
w
Un Séminaire de formation en Médecine Traditionnelle des agents de centres
de santé de Kissidougou-Guéckédou avec l’aide de la GTZ ;
w
Un Séminaire de formation en Médecine Traditionnelle du Personnel de
Centres de Santé et Hôpitaux de N’Zérékoré et Lola avec l’aide de l’EMS ;
w
Deux Séminaires de formation sur le SIDA
destiné aux tradipraticiens de Boké et Macenta avec l’appui de
PNLS ;
w
Séminaires de formation en Médecine Traditionnelle de tous les IRS et DPS à
Kankan et Kindia ;
Grâce à la collaboration de l’OMS, une bourse de stage a
été accordée à un cadre de la Division, pour une formation en Botanique
Systématique au Centre National de Floristique d’Abidjan.
Un module de formation en médecine traditionnelle a été
élaboré à l’intention des élèves des Ecoles nationales de la santé. Un atelier
a été organisé pour la validation de ce module. Un autre module est
présentement dispensé pour les Etudiants du Département de Pharmacie et
prochainement pour le Département de Médecine à l’Université de Conakry.
Enfin un bulletin d’information scientifique
« Médecine de nos ancêtres » a été mis au point. Trois numéros de ce
bulletin ont été déjà diffusés.
Dans la perspective de l’intégration et de l’utilisation
des médications traditionnelles dans la gamme des médicaments essentiels des
centres de santé, un pharmacien du secteur privé et le LACONA en collaboration
avec la Division Médecine Traditionnelle ont mis au point :
-
Un sirop anti-parasitaire à partir de Pavetta
owariensis
-
Une teinture utérotonique à partir du Xylopia
aethiopica
-
Une pommade dermatologique à partir du Vernonia
colorata
-
Un sirop antitussif à partir du Dissotis
rotundifolia qui connaît un début de commercialisation
Pour soutenir ces efforts, une table ronde promotionnelle
sur la production pharmaceutique locale à base de plantes a été organisée grâce
à l’appui de l’OMS.
3 -
CONTRAINTES ET DIFFICULTES
Au nombre des principales contraintes identifiées il faut
citer ;
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le manque de ressources financières pour poursuivre le recensement et les
enquêtes ethnothérapeutiques en Haute Guinée et en Moyenne Guinée, et pour
produire les documents portant sur les résultats des enquêtes menées en Guinée
Forestière ;
w
le manque de financement pour poursuivre les sessions de formation à
l’intention du personnel des Centres de Santé ;
w
la faible collaboration entre le personnel de santé et les tradipraticiens,
faute de motivation et de formation adéquate ;
w
l’absence au niveau intermédiaire, de structures appropriées pour
l’évaluation scientifique des thérapies traditionnelles ;
w
les faibles capacités de supervision et d’appui technique du niveau
central, par manque de moyens logistiques et par manque de formation
spécialisée dans certains domaines comme la programmation informatique et
l’anthropologie médicale.
w
Le manque d’une structure nationale spécialisée de soutien à la recherche
et à la formation en médecine traditionnelle ;
w
L’absence de mécanisme d’incitation pour la production locale de
spécialités pharmaceutiques à base de plantes de la pharmacopée traditionnelle,
bien que les étude pharmacognosiques aient montré l’efficacité et l’innocuité
thérapeutiques d’un grand nombre d’entre elles.
4 -
PERSPECTIVES
Dans les six années à venir, le Département de la Santé
Publique se fixe pour objectifs majeurs :
w
de renforcer la collaboration avec les tradipraticiens, par la mise en
place et la dynamisation des associations des tradipraticiens d’une part, et
par la formation – sensibilisation du personnel des centres de santé d’autre
part ;
w
d’impulser les recherches sur la médecine traditionnelle et les plantes
médicinales, par la mise en œuvre d’un programme d’infrastructures,
d’équipement et de formation ;
w
de promouvoir le développement de la production locale de spécialités
pharmaceutiques à base de plantes, en vue de leur introduction progressive dans
la gamme des médicaments essentiels des centres de santé ;
5 -
CONCLUSION
Comme on le voit, malgré l’existence d’une volonté
politique affirmée pour la promotion de l’utilisation des médicaments
traditionnels à base de plantes, il faut souligner que nous n’en sommes qu’au
stade des préliminaires.
Vous comprendrez dès lors combien est grand notre bonheur
de faire cette communication à cet atelier, qui regroupe d’éminents
spécialistes du domaine des plantes médicinales, sur le niveau actuel du
Développement de la Médecine Traditionnelle et des Plantes Médicinales en
Guinée.
Nul doute que les échanges d’expériences qu’il favorisera
éclaireront d’une lumière nouvelle la voie devant conduire nos pays à la pleine
utilisation de notre riche potentiel de plantes médicinales, dans le cadre de
la politique de soins de santé primaires, notamment dans sa composante
médicaments essentiels.
A ce niveau, qu’il me soit permis d’exprimer nos
chaleureux remerciements au CRDI ainsi qu’au CLEI non seulement pour l’heureuse
initiative prise pour organiser le présent Atelier, mais aussi pour l'honneur
et le privilège fait à notre pays d'abriter les présents travaux.
Je vous remercie.
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